Les manifestations contre la réforme des retraites se poursuivent en ce début d’année 2020. Aux gilets jaunes de l’année passée se mêlent désormais robes d’avocats, professeurs de lycées, étudiants et lycéens pour ceux qui font le choix de sécher, ainsi que de nombreuses associations féministes (Femmes Solidaires, Osez le féminisme, mais également le CIDFF (Centre d’Information sur les Droits des Femmes et des Familles), le Planning Familial et beaucoup de manifestant.e.s revendiquant leur féminisme à titre individuel). Que reprochent-elles.ils à la réforme des retraites ?
La disparition des mécanismes de solidarité
Première mesure qui fait débat : les droits de « solidarité » autrefois garantis ne le sont plus. Ils feront partie d’une « enveloppe séparée » selon le discours de Jean-Paul Delevoye, c’est-à-dire un budget indépendamment géré par l’Etat et non par la Sécurité Sociale. Comment être sûr alors que cette enveloppe ne soit pas oubliée par le gouvernement en cas de budget défaillant ? L’autonomie des femmes étant déjà mal assurée en raison de leur salaire inférieur à celui des hommes (elles touchent 75% du salaire des hommes et 60% seulement de leur retraite selon les analyses du collectif féministe Nos Retraites), cette nouvelle mesure accentue leur péril financier.
Des pensions de réversion qui changent
Autre sujet polémique : le système de « réversion » des pensions. Il faut d’abord rappeler que les hommes touchent aujourd’hui 1 933€ de pension brute par mois contre 1 123€ pour les femmes. Cette inégalité se renforce avec cette réforme puisqu’en cas de décès du mari, la veuve doit être à la retraite elle-même après une carrière complète (soit 43 ans de carrière) et attendre d’avoir 62 ans (contre 55 ans auparavant) pour obtenir la pension du mari défunt. Cette décision risque donc d’augmenter la précarité et le seuil de pauvreté chez les femmes âgées. De plus, cette mesure ne prend pas en compte les couples unis par le PACS ou autre forme de concubinage, et il ne faut pas oublier de mentionner la situation des femmes divorcées : celles-ci ne toucheront aucune pension liée à l’ex-mari. Les femmes en situation de violence domestique ne seront plus en capacité de se protéger car elles seront dépendantes de leur conjoint. Cette prise de conscience alarme plus d’une association en lutte contre les violences faites aux femmes qui rappellent le nombre de féminicides en France en 2019 : 122.
Les mécanismes de compensation liés aux enfants… et aux parents
Rappelons-le : les 8 trimestres de cotisation attribués à la mère pour chaque enfant seront remplacés par des points. Ces derniers, additionnés à l’interruption de la carrière pour grossesse, au congé maternité, au temps partiel ou encore aux périodes de chômages, dévalorisent la retraite des mères (pas assez de points).
De plus, la majoration de 10% attribuée à partir du 3e enfant est remplacée par une majoration de 5% à chaque enfant avec une bonification de 2% au 3e enfant. Celle-ci est octroyée à la mère par défaut mais les parents ont jusqu’aux 4 ans de l’enfant pour échanger. Les hommes ayant un salaire plus élevé que les femmes, les couples auront ainsi tendance à choisir de l’affecter au salaire de celui-ci. Une décision qui donne l’illusion d’un libre choix alors qu’elle met en péril financier la femme : celle-ci se retrouve à nouveau dépendante du salaire de son conjoint.
Pour plus d’infos :
Le Collectif Nos Retraites s’empare du sujet sur Mediapart :
https://blogs.mediapart.fr/iconoclash/blog/070120/reforme-des-retraites-ou-sont-les-femmes
L’acte de révolte du Collectif de lutte 95 à Cergy:
Un article de Libération:
Diane Borderieux