7ème édition du festival Enracinement/Déracinement : Rencontre avec Thierry Falvisaner
A un moment où l’extrême-droite et ses idées sont omniprésences sur la place publique, étouffant la solidarité et l’humanité, la 7ème édition du festival Enracinement/Déracinement de la compagnie Théâtre Charbon est à contre-courant des médias mainstream. Du 30 novembre au 07 décembre, le Théâtre Gérard Philipe d’Orléans la Source accueille la nouvelle édition d’un évènement remettant au centre du discours les principaux concernés, des vies, des personnes, des individualités, des existences constamment sous le feu des violences. Mais ces voix s’expriment, se montrent et Thierry Falvisaner organisateur du festival nous invite à les entendre et les voir et à les comprendre avec un « léger pas de côté artistique ».
Le mot d’ordre « ACCUEIL »
Le racisme, la xénophobie, le rejet des étrangers appelez cela comme vous le souhaitez ; toujours est-il que l’espace politico-médiatique en est pollué. Les questions sont toujours les mêmes : comment contrôler l’autre, comment limiter l’autre ou comment s’en débarrasser. Il n’est jamais question d’accueil ! L’autre est dépeint en ennemi, en danger. Le contradictoire n’est pas accepté et dépeint en islamo-gauchisme ou d’autres termes vides de sens dans le genre. La contradiction paraît alors impossible, voire révolutionnaire. Il n’en est rien, il n’y a rien de révolutionnaire à accueillir l’autre comme iel est.
Pour sa septième présentation le festival Enracinement Déracinement a voulu magnifier la puissance de l’accueil. L’accueil demande des efforts, il n’est pas un simple « bonjour ». Il demande du travail. Il exige d’abord de voir et entendre l’autre. Il demande de repenser le « je » pour atteindre le « nous ». Accueillir est essentiel pour lutter contre les inégalités. Les différentes propositions artistiques ont laissé germer des idées pour un nouvel accueil. Le festival laisse aussi une grande place à la jeunesse en proposant lectures et rencontres dans des établissements scolaires d’Orléans.
« Un pas de côté artistique »
Sur ces six jours, expositions, théâtres, cinémas, projections, performance, danse et slam ont été programmés. Pour cette édition, la compagnie a casté des personnalités travaillant sur les questions de migration ou de colonisation comme le rappeur et conteur Rocé, la photographe Géraldine Aresteanu ou encore Adrien Chennebault (musicien), Coline Pilet (metteuse en scène), Julia Nivan (musicienne) et Samuel Archambault (musicien) pour la « Voix d’exils ». Si la « Voix d’exils » vous dit quelque chose c’est sûrement parce que ce spectacle est le résultat d’une collaboration avec La Cimade, il y a 6 ans. En programmant un tel spectacle, c’est (consciemment ou non) aussi tourner le dos aux propos racistes accusant encore et toujours sans fondement La Cimade d’être prometteuse du terrorisme.
Toutefois, il ne s’agit pas de donner à s’exprimer les personnes migrantes sur leur situation. Ce n’est pas un évènement qui donne une vision misérabiliste des personnes migrantes. Ici, on travaille, on fait un pas de côté et on travaille, avec son histoire, à un mouvement artistique.
La remise en cause de la politique locale orléanaise
Alors que la politique locale (qui n’est pas propre à Orléans) est la gentrification et l’isolement des populations avec toujours plus de barrières, toujours plus de grillages, le festival invite à briser ces frontières. Il invite la ville dans les quartiers où peuvent naitre des talents, si tenter qu’on leur en laisse la chance de germer. Le festival abolit les frontières en étant partout et ailleurs, au Théâtre Gérard Philipe, dans la ville d’Orléans, à l’Argonne, les Blossières, Dauphine et Saint-Marceau.
L’engagement de Thierry Falvisaner envers les résidents de la Source, c’est aussi une politique tarifaire. Déjà bien inférieurs aux tarifs classiques pour une représentation artistique, les habitant.e.s des quartiers de la Source ont pu bénéficier d’un tarif réduit au même titre que les habituel.le.s bénéficiaires de ces réductions. Cette démarche s’inscrit dans une dynamique d’invitation des sourcien.ne.s aux théâtres, des publics bien trop exclu.e.s des représentations culturelles orléanaises.
Pour Radio Campus, nous avons pu échanger avec l’organisateur de cet évènement, Thierry Falvisaner.
article, photo et interview: Steven Miredin