De l’Argonne à Melbourne, en passant par Londres

Le Bondy Blog Centre est parti à la rencontre d’Alan Alidor, jeune cuisinier ayant travaillé dans des grands restaurants tels que le « Portmeirion » au Pays de Galles, le « Hacienda » à Ibiza ou bien le « Royal Automobile Club » à Londres. Issu d’une famille très modeste, voire pauvre, Alan a longtemps vécu à l’Argonne avant de déménager à la campagne, plus précisément à Meung-sur-Loire avec toute sa famille. Aujourd’hui, il est très loin du quartier de l’Argonne, il se trouve actuellement en Australie en train de réaliser un de ses plus grands rêves, voyager. Poussé par le manque de perspectives en France, des préjugés sur sa condition sociale et surtout l’inégalité financière que peuvent connaître les jeunes issus de milieux sociaux défavorisés, il a décidé de se battre. Après une période financièrement compliquée , il a réussi à remonter la pente, notamment grâce au soutien de ses amis les plus proches et une grande détermination. L’Argonnais a travaillé dans des restaurants 5 étoiles en Angleterre, Espagne, Finlande ou encore en Estonie. Tout ceci, il le doit à son talent, à une grande volonté et à un peu de chance comme il le dit lui-même. Nous avons interrogé Alan, sur sa passion, sa détermination à se battre. Il nous livre dans cette interview, quelques conseils, et incite les jeunes à partir à l’étranger ou réaliser leurs rêves malgré leur condition sociale ou leur situation financière. 

Comment t’est venue cette passion pour la cuisine ?

Je suis un grand gourmand. Au départ, j’étais attiré par les langues étrangères. J’ai dû arrêter ma scolarité durant ma 1 ère année de bac Littéraire. Au bout d’un an, j’ai dû me motiver et trouver un moyen de m’en sortir et aussi d’avancer. Alors je me suis tourné vers la cuisine.

Tu as vécu dans le quartier de l’Argonne et tu as grandi à Meung-sur-Loire dans une famille très modeste… la cuisine c’était un moyen pour toi de t’en sortir ?

Disons qu’après avoir arrêté mes études littéraires, j’ai dû me réorienter. Et la cuisine était le seul domaine qui m’intéressait parmi les différents apprentissages proposés. Étant gourmand, je pense que c’était ce qui me convenait le mieux.

Malgré les problèmes financiers que tu as pu rencontrer, les obstacles de la vie, tu as non seulement réussi à faire de la cuisine ton métier, mais en plus de cela, tu as atteint les sommets, en travaillant pour de grandes enseignes de 5 étoiles. Comment tu ressens cette réussite ?

Pour être honnête, je suis très fier de moi. Je suis aussi très reconnaissant ! Certains jours je ne réalise pas encore tout ce à quoi j’ai pu avoir accès. Je suis vraiment heureux d’avoir eu ces opportunités . Vraiment. J’accède à une vie à laquelle je n’ai jamais pensé avoir droit.

Décris-nous un peu ton parcours, du début jusqu’à ton dernier poste occupé.

Bien avant la cuisine, je faisais des études de langues. J’étais déjà passionné par l’étranger, les voyages etc. J’ai commencé chez un traiteur à Orléans puis en m’installant à Meung-sur-Loire j’ai continué mon apprentissage dans un restaurant traditionnel français avec un chef génial, qui m’a d’ailleurs permis par la suite de faire un stage en Finlande et en Estonie durant mon Brevet Professionnel. C’est comme ça que l’intérêt pour les voyages à l’étranger et l’envie de travailler en dehors de la France se sont développés. Après mes examens en 2014, j’ai enchaîné les petits restaurants jusqu’à novembre 2015. Et puis, certaines choses qui se sont passées dans ma vie à l’époque m’ont incité, à quitter la France. J’ai décidé de partir à Londres. Au bout de quelques mois, je me suis retrouvé à Ibiza dans mon premier hôtel 5 étoiles, le plus luxueux de l’île. Ensuite, j’ai eu une belle opportunité au Pays de Galles dans un hôtel 4 étoiles puis à St Tropez, et par la suite dans le sud de Londres dans un palace. Et me voilà aujourd’hui à Melbourne en Australie.

Actuellement en Australie, quels sont tes projets pour l’avenir ?

Je suis actuellement en « Visa Vacances Travail » renouvelable un an. Mais pour être honnête, j’aimerais m’installer sur du long terme en Australie. Je pense voyager tout autour de l’Australie car il y a énormément de choses à voir. Je veux aussi parcourir l’Asie !

Pourquoi avoir choisir l’Australie comme destination, comme pays où tu voudrais travailler et construire ta vie plutôt que la France ?

Pourquoi ? Tout simplement parce que les opportunités sont beaucoup plus intéressantes ! Le niveau de vie est beaucoup plus élevé, et je veux pouvoir me construire une carrière très solide. Étant en Australie je pense vraiment pouvoir avoir accès à un beau futur !

Le fait d’être issu d’un milieu social modeste voire « défavorisé », quels problèmes tu as pu rencontrer dans ta vie et dans ton parcours ?

Venant de l’Argonne, qui est vu comme un quartier « défavorisé  » « mal fréquenté « , il y a  eu effectivement  beaucoup de « préjugés  » par des  personnes qui ne connaissent ni le quartier ni ses habitants. Beaucoup de portes se sont fermées quand je disais que je venais de là. Sans te mentir, le racisme et la discrimination sont encore bien présents dans certaines situations. Donc, trouver un moyen de réussir n’a pas toujours été évident. Mais j’ai persévéré. J’ai dû énormément travailler. D’une, parce que je voulais réussir. Mais aussi parce-que je voulais montrer que peu importe le milieu d’où l’on vient, si on laisse à quelqu’un une chance de faire les choses correctement, il y a toujours un moyen de s’en sortir.

Que conseilles-tu à des jeunes qui se découragent d’avancer dans la vie, à cause des problèmes financiers, de leurs milieux sociaux, des quartiers ?

Ne jamais baisser les bras ! Et bien au contraire, montrer aux gens qui ne croient pas en nous qu’on peut y arriver, et que nous voulons nous en sortir et réussir ! Maintenant il faut vraiment se bouger et se donner les moyens. Se plaindre n’est pas la meilleure solution et ça ne fait pas avancer.

Quelle a été ta plus grande motivation pour réussir dans la vie et pourquoi ?

Grandir dans un milieu modeste n’est pas forcément évident mais j’ai eu une très bonne éducation, ma mère a tout fait pour qu’on s’en sorte ! Aujourd’hui je sais qu’elle est fière de moi et ça, ça me rend heureux. Mais je veux vraiment aller encore plus loin et construire une carrière professionnelle afin d’avoir une stabilité et qu’enfin ma mère puisse se reposer. Une fois que je serai au sommet, elle sera la première à  en profiter. Je veux la faire voyager et qu’elle arrête de travailler.

Comment vois-tu l’avenir des jeunes issus des milieux sociaux défavorisés en France ?

Très compliqué de répondre à cette question. On voit que d’un côté, ces jeunes ne sont pas forcément aidés, mais on voit d’un autre côté, certains de ces jeunes qui ne montrent pas une grande   motivation. Je me dis qu’il y a ce paradoxe qui se creuse entre deux mondes totalement différents. Mais comme je l’ai dit, il faut se donner les moyens. Ce n’est pas facile tous les jours mais c’est faisable.

Faut-il forcément partir à l’étranger ?

Moi, je me sens mieux à l’étranger. La mentalité est très différente. J’ai toujours été très bien accueilli que ce soit en Angleterre, en Finlande, ou même actuellement en Australie. Les opportunités sont beaucoup plus importantes et plus intéressantes. Étant encore jeune, c’est le moment idéal pour moi de découvrir le monde et de voir différentes cultures. C’est aussi un apprentissage intellectuel et culturel très enrichissant.

Nato Phounthouchachvili

Trouvé sur La Rédac Pop, le média participatif et citoyen de Radio Campus Orléans