A Gien, le cinéaste François Zabaleta défend la culture alternative avec son Laboratoire éphémère

François Zabaleta a joué la pièce "Petit Léon" avec le jeune comédien Damien Reinhardt. Photos Fabien Bourgeois
François Zabaleta a joué la pièce "Petit Léon" avec le jeune comédien Damien Reinhardt. Photos Fabien Bourgeois

Dans l’est du Loiret, en pleine ruralité, l’accès à la culture dite alternative est parfois difficile. Quelques artistes s’efforcent pourtant de la mettre en avant dans le Giennois. Parmi eux, François Zabaleta. Le cinéaste, metteur en scène, photographe et écrivain utilise son Laboratoire éphémère, à Gien, pour proposer des spectacles à forte ambition artistique. Exemple avec Petit Léon.

« Pourquoi filmez-vous ? », demande-t-on à François Zabaleta. « Pour courir plus vite que le doute, répond-il. Pour tenter de retrouver la grâce perdue. Pour mettre l’ennui de vivre sur liste d’attente. Parce que, les histoires, je préfère les raconter plutôt que les vivre. Parce que je ne sais pas avancer sans béquille. Parce que dans la vie, on n’a pas le final cut. Parce que Dieu est un metteur en scène dont je jalouse chaque mauvaise idée. »

Voilà la philosophie de ce cinéaste, metteur en scène, photographe et écrivain âgé de 64 ans, installé à Gien. Dans cette commune rurale de moins de 14.000 habitants, située dans l’est du Loiret, il est une sorte d’Ovni.

A écouter ci-dessous : notre émission d’une heure consacrée à François Zabaleta, son Laboratoire éphémère et sa pièce Petit Léon.

Cet artiste prolifique compte plus d’une soixantaine d’oeuvres cinématographiques et photographiques à son actif. Sans compter les adaptations théâtrales ou en performances scéniques de plusieurs de ses créations, ainsi que des expositions.

Une proposition exigeante et parfois incomprise

Une productivité qui n’éteint en rien l’ambition artistique de cet homme récompensé sur de nombreux festivals prestigieux comme celui du court-métrage de Clermont-Ferrand, Côté court à Pantin, Chéries-chéris à Paris, ou encore Doc en courts à Lyon. Un de ses films, La vie intermédiaire, a même été sélectionné dans la section ACID du Festival de Cannes, en 2009.

François Zabaleta est connu et reconnu pour ses oeuvres aux thématiques souvent dures, servies par une photographie et une scénographie grandement travaillées. L’amour, la sexualité des femmes âgées, l’identité de genre, la parentalité, l’anorexie… Ces quelques thématiques ne représentent qu’un petit aperçu de toute la réflexion que l’artiste déploie.

Dans un territoire rural où l’accès à la culture alternative est parfois difficile, les créations de François Zabaleta représentent une proposition artistique différente du champ mainstream, exigeante et parfois incomprise. Mais l’artiste a son public de fidèles, qui suit sa carrière et qui est au rendez-vous des spectacles qu’il a récemment conçus et joués dans le Laboratoire éphémère, sa salle personnelle située dans sa ville loirétaine.

Plus précisément, il s’agit d’une ancienne salle de ventes située sur les quais de Loire qu’il a reconvertie en salle de spectacles, de rencontres et d’expositions accessible gratuitement pour le public. Le lieu appartient à son mari, Jean-Claude Renard, commissaire-priseur ayant exercé son activité pendant longtemps à Gien.

Un espace de 450 mètres carrés au sol dont il se sert notamment pour proposer des lectures-performances de certains de ses films, et ce, de manière bénévole avec les artistes et techniciens qui collaborent avec lui.

Une médaille de la Ville

En juin dernier, François Zabaleta a proposé deux représentations de sa pièce Petit Léon en binôme avec le jeune comédien Damien Reinhardt. Les deux artistes incarnent le même personnage à des âges différents de sa vie. Une proposition théâtrale complétée en juillet par plusieurs adaptations de cette même pièce sous un angle totalement différent : un spectacle dansé assuré par son amie Laurence Pouyanfar, qui a proposé avec son école de danse une version chorégraphiée de cette histoire.

Le Laboratoire éphémère s’est intégré au paysage giennois depuis un an. Son nom n’a pas été choisi au hasard. François Zabaleta considère que le spectacle vivant est intrinsèquement fugace. Il s’agissait aussi d’un avertissement pour que les spectateurs fassent vivre la culture alternative qu’il prône. « Les gens doivent savoir qu’on ne continuera pas s’ils ne viennent pas », insistait-il il y a un an, alors que le lieu prenait forme.

Mais au vu du public réuni à chaque spectacle, ce lieu a peut-être encore de beaux jours devant lui. La reconnaissance des institutions locales a été tardive. Mais elle est arrivée récemment. Francis Cammal, le maire de Gien, a remis la médaille de la Ville à François Zabaleta le 5 juin 2024, à l’issue de la seconde représentation de Petit Léon.

Une grande surprise pour l’artiste local. Une fierté et une grande émotion aussi face à ce qu’il a qualifié de « reconnaissance inattendue pour une forme de théâtre que certains peuvent trouver déconcertante ou esthétiquement trop ambitieuse ».

Thomas Derais

Trouvé sur La Rédac Pop, le média participatif et citoyen de Radio Campus Orléans