« La protection de l’enfance a pour but de prévenir les difficultés auxquelles les parents peuvent être confrontés dans l’exercice de leurs responsabilités éducatives, d’accompagner les familles et d’assurer, le cas échéant, selon des modalités adaptées à leurs besoins, une prise en charge partielle ou totale des mineurs. Elle comporte à cet effet un ensemble d’interventions en faveur de ceux-ci et de leurs parents. Ces interventions peuvent également être destinées à des majeurs de moins de vingt et un ans connaissant des difficultés susceptibles de compromettre gravement leur équilibre. La protection de l’enfance a également pour but de prévenir les difficultés que peuvent rencontrer les mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille et d’assurer leur prise en charge. » Telle est la définition de la protection de l’enfance d’après l’article L. 112 de loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance.
La mission principale des travailleurs sociaux de la protection de l’enfance est de protéger l’enfant. Mais dans un contexte où les restrictions budgétaires sont importantes, où il y a un manque de personnel, où l’aide sociale à l’enfance doit prendre en charge des arrivées massives de mineurs non accompagnés et où l’arrêt des contrats jeunes majeurs pose un véritable questionnement, les éducateurs en viennent à se demander si les moyens dont ils disposent sont adaptés pour répondre à cette mission de protection.
Un éducateur pour douze jeunes
J’ai rencontré des étudiants qui ont travaillé dans des maisons d’enfants à caractère à social dans le Loiret. Ils ont pu me faire part des difficultés rencontrées dans leurs structures respectives. Le premier d’entre eux témoigne : « 2 postes manquent mais ne sont pas remplacés par manque de moyens, des volets cassés non remplacés, de l’argent pour la vêture insuffisant : 90 euros sur un trimestre pour rhabiller complètement une jeune qui n’a rien ». Le deuxième complète : « Les éducateurs ne travaillent quasiment jamais en binôme, hormis lors des temps de réunion et un jour par semaine. Le reste du temps, il n’y a qu’un éducateur présent sur le groupe pour 12 jeunes ». La situation est différente dans les établissements accueillant des jeunes avec des troubles du comportement. Dans un Institut Thérapeutique Educatif et Pédagogique (ITEP) dans lequel j’ai travaillé, il y avait 2 éducateurs présents pour 8 jeunes. Des exemples comme ça, il y en a encore plein. Mais ceux-ci illustrent les différences de moyens alloués aux problèmes que nous pouvons rencontrer au quotidien.
Neuf places pour 24 jeunes
Le 19 septembre 2017, une manifestation du personnel de la Maison de l’Enfance d’Orléans a eu lieu. C’est le seul accueil d’urgence dans le Loiret qui existe et qui a pour mission d’accueillir et héberger l’enfant lorsqu’il est retiré du domicile familial. Cet accueil temporaire doit durer 6 mois, le temps de trouver une maison d’enfance à caractère social ou une famille d’accueil pour le jeune mais faute de place, certains y sont depuis 2 ans. La Maison de l’Enfance d’Orléans a un agrément de neuf places. En ce début d’année scolaire 2017, elle accueillait en réalité 24 jeunes. Grâce à la manifestation des professionnels de l’institution, les arrivées ont été gelées.
98 000 cas connus d’enfants en danger en France
Devons-nous nous battre constamment pour obtenir un lieu de vie décent pour ces enfants en manque de repères, de sécurité, d’affection ? Quel sera l’avenir de la protection de l’enfance au moment où des institutions vont fermer et recourir au placement à domicile. Parlons-nous alors toujours de protection dans ces cas là ? N’oublions pas qu’aujourd’hui, il existe plus de 98 000 cas connus d’enfants en danger en France. Alors oui ! J’ai peur pour l’avenir de ces jeunes qui ont été retirés de leur domicile familial car ils encourraient un danger avéré et qui ont finalement été replacés au sein de ce même domicile familial. Les acteurs du placement à domicile répondront qu’un éducateur assurera un suivi mais sera-t-il suffisant pour prévenir un risque ? L’état présent et l’avenir de la protection de l’enfance me questionnent, nous questionnent… Mais, mes valeurs ne changeront jamais. Nous, travailleurs sociaux, continuerons de nous battre.
Etudiante ES 2